Réflexions autour de la réussite à un diplôme professionnel

J’ai participé cette semaine au jury Aries Grenoble qui sanctionnait les formations Infographiste en multimédia et Webmaster. Bien que rompu maintenant à cet exercice – c’est la 5e fois que je m’y prête – ces deux jours restent des temps forts, où l’on prend conscience que notre décision peut engager la vie des futurs diplômés sur les mois à venir (diplômé ou pas d’ailleurs…et c’est là le point délicat), aussi est-ce une responsabilité dont je sens tout le poids et que j’ exerce le plus consciencieusement possible.

Nous pratiquons cet exercice à deux professionnels pour obtenir un point de vue contradictoire ; c’est parfois l’occasion de très belles rencontres. Avec l’expérience, je découvre qu’il est « assez » simple d’évaluer en définitive : cela tient au respect de critères tellement convenus et banals que j’ai hésité à les lister.

Toi le futur candidat qui me lis, voici ma recette :

    • Pour combattre la procrastination et bénéficier d’un premier avis pro, un portfolio prêt dès les examens blancs
    • De l’originalité dans le travail proposé, de la recherche.
    • Si pas d’originalité…du travail, et de la capacité à en fournir régulièrement, en dépassant le cadre scolaire que l’école propose. Dans tous les cas futurs candidats, vous n’êtes plus à l’école mais sur le palier du marché du travail. Ceux qui vivent cela scolairement sont en général ceux qui ne passent pas l’examen.
    • Beaucoup de recherches personnelles pour exprimer cette originalité, et développer une « patte graphique » naissante ou déjà présente.
    • De la motivation et de l’énergie que l’on puisse déceler rapidement…De l’envie de faire.
    • Du travail  (je l’ai déjà dit ?…pas grave il en faut plus que vous n’imaginez)
    • De la maturité et de l’honnêteté pour présenter des choses qui vous appartiennent.
Les exigences d’un futur diplômé ne sont finalement pas si éloignées de celle d’un entrepreneur !

C’est assez indécent à avouer, mais je crois que les candidats qui font preuve de ces qualités ci-dessus listées, pourraient être validés en moins de 10 minutes. Les 50 minutes restantes servant pour la plupart des cas, soit à profiter de la prestation d’un candidat brillant (celui que l’on pourrait valider en 10′), soit à se demander si tel autre élève plus moyen, est en mesure de décrocher tout ou partie du diplôme.

Autant je peux être touché et marqué par un candidat qui ne disposera pas d’un niveau encore suffisant pour aborder le marché du travail, mais dont l’attitude énergique et l’envie seront présentes, autant un élève fumiste me hérissera le poil assez rapidement. Les excuses du type « j’étais pas là le jour où on l’a abordé, on m’a effacé mon disque dur, j’savais pas, j’lai pas apporté, mon chien l’a mangé » font baisser rapidement ma bienveillance, car je sais que ces faux prétextes ne tiendront ni devant un futur patron, ni devant un futur client.

Je suis admiratif devant ces quadragénaires qui engagent une reconversion bien souvent forcée et qui passent d’une phase pendant laquelle ils ont produit, donné de leur personne des années durant dans une entreprise,  à une phase durant laquelle ils inversent ce processus en ingurgitant subitement une somme de connaissance importante pour être au niveau. Certains savent rebondir avec brio. Pour d’autres, j’ai parfois le sentiment de me transformer en psychothérapeute. Ce n’est pas une position que je déteste adopter (j’aimerais tellement en faire plus !). J’éprouve beaucoup de commisération envers ces violentés du monde du travail qui tente la reconversion. lutte joyeuse de la vie

Que l’on soit salarié, et à fortiori que l’on soit entrepreneur, il est nécessaire de garder une attitude professionnellement combative, de garder du temps pour la remise en question, et pour l’apprentissage de nouvelles techniques. Voilà que je débite encore des fadaises, mais finalement pas tant que cela. La vie est une lutte, à tout niveau et dans toutes les dimensions : une lutte pour rester vivant, pour garder la chaleur que le corps propose, se préserver des attaques pathogènes, se mobiliser contre nos côtés sombres qui contrairement à notre part de lumière, s’accroit naturellement dans l’inaction. Cette lutte joyeuse et non agressive fait appel à notre vigilance, notre éveil. S’arrêter de pagailler dans ce grand courant, c’est mourir, mourir à soi et à terme, mourir tout court.

Chaque année j’apprends beaucoup auprès de ces élèves que je respecte sans aucune condescendance. Cette resistance nécessaire est sans doute la leçon que je tirerai de cette cuvée. Sans doute est-ce cela le vrai Djihad (j’emploie ce mot malheureusement à la mode sans aucun opportunisme…Ne manquez pas de relire la page wikipedia à ce propos), cette lutte intérieure pacifique et bienveillante avec l’âme et non avec les armes, cette quête incessante vers un mieux que propose toutes les philosophies.

Cette quête, je vous la souhaite heureuse et satisfaisante en cette nouvelle année !

 

2 réponses
  1. Sifhel
    Sifhel dit :

    Voilà un article très intéressant ! Je cherchais justement des renseignements sur ce qu’on attendait de nous dans ce genre d’épreuve car je m’engage dans cette voie en tant que candidate en 2016 héhé !

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  2. Juliette
    Juliette dit :

    Formatrice en formation d’ingé en formation pour adulte, j’approuve et me retrouve dans ce billet. Entre bienveillance et exigence, ré-ingénierie pédagogique et parcours individuels, apprentissages et compétences… Diplômer ou ne pas Diplômer des candidats « moyens », « limites ». C’est un débat qui en est presque éthique, reflet de notre propre travail de formateur aussi (avec un impact sur l’orgueil parfois), lutte contre les demandes institutionnelles qui exigent un taux de réussite… Sur ce je réécoute le cours

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